Limoges aime le shoegaze : Parqks, Mountebank, Kerity et Mako Shopstore
J'ai vécu du début 90's à l'an 2000 dans la bonne vieile ville de la porcelaine et de Richard Dacoury. A l'époque, le shoegaze équivalait à une sorte de religion pour l'athée que j'étais.
Les évangiles de Saint Kevin Shields de My Bloody Valentine? Je les connaissais par coeur. Je voulais ressembler à Saint Mark Gardener de Ride pour pouvoir charmer la belle Rachel Goswell de Slowdive ou Miky de Lush, c'était selon mes humeurs. Fantasme d'ado mal dans sa peau désirant vivre ailleurs. Un poster de la pochette du "In Ribbons" des Pale Fountains représentait l'idéal en matière de déco pour l'appartement d'un étudiant et se devait de trôner sur l'autel destiné à la pratique du culte. La tenue typique du shoegazer limousin? Pull en laine bleu marine trois fois trop grand, col rond, jeans usés et veste en cuir noire en hommage à Saint Jesus & Mary Chains. Les cheveux mi-longs évidemment. Et la cassette du "Everything's alright forever" des Boo Radleys première époque dans le Walkman.
Petite vidéo de cover bien dans l'état d'esprit. Une sorte de rêve et de fantasme du shoegazer mélancolique que j'étais. Mais attention, nous n'étions pas des endives toutes molles non plus. Sous le gros pull difforme, se cachait bien souvent un signe ostentatoire de passion noisy, un t-shirt de Sonic Youth ou du Sugar de Bob Mould d'Husker Due. Les deux genres sont issus du même terreau. Comme en témoigne cette tuerie de Ride.
On était pas nombreux dans le bled à ressembler à ça. Et si on nous demandait quel style musical avait notre préférence, le mot shoegazing déclenchait à coup sûr l'hilarité chez les incultes. Il fallait expliquer ce que signifiait ce terme inventé par la presse britanique. En gros, "se regarder les chaussures". Finalement, avec du recul, c'était assez approprié. Si les hebdomadaires anglais tels que le NME ou le défunt Melody Maker désignaient par ces mots le fait que les musiciens shoegaze passaient leurs concerts les yeux rivés sur les pédales de distorsion, il n'est pas exagéré de signaler également que cette musique collait parfaitement à l'état d'esprit des jeunes gens rêveurs et solitaires qui déambulaient timidement tête basse dans les rues limougeaudes.
Malheureusement, le shoegaze était peu pratiqué musicalement dans nos contrées. C'était plus de l' indie-pop tendance Sarah Records pour certains, l'influence Bowienesque/Britpop pour un autre en particulier. Ou bien de la noise bien plus agressive et du folk (en fait qu'une unique fratrie).
Bref, pas une occase de pratiquer le culte shoegaze en communauté. Et les années passèrent.
Un départ de Limoges, puis enfin un retour en 2010. Durant ce laps de temps, peut-être que la scène shoegaze de Limoges avait éclos sans que je sois tenu informé? Faudra se renseigner, mais de là vient la soudaineté et la surprise avec lesquelles j'ai découvert cette nouvelle scène haut-viennoise.
Donc je redeviens un adepte des concerts dans cette ville. Pile poil pour un concert dominical des shoegazer de Sunny Day in Glasgow devant à peine 20 personnes présentes dans les murs de la Fourmi.
A ce moment-là, le retour du shoegaze dans les sphères indies mondiales se confirmait. Il était espéré et professé par votre serviteur et d'autres. Après le retour du rock début 2000's, c'était assez facile d'imaginer que des jeunots moins portés sur les dérives de Doherty & co et apeurés par les hordes de fans Strokiens en converse ne se trouvent un passage vers un monde plus calme et propice aux rêveries mélancoliques.
Les spectateurs étaient bien plus nombreux pour les excellents A place to bury Strangers en décembre suivant. Je n'avais pas remarqué les nouvelles têtes présentes déjà pour Sunny Day in Glasgow. Les anciennes cachaient les nouvelles.
Si y en a une que l'on doit remercier c'est bien la boîte de prod Mégablast. Co-organisatrice à chaque fois. Mais savait-elle ce que cela allait donner au niveau local? Et ce en corrélation avec le retour mondial du style shoegaze via des groupes comme Echo Lake, Grouper, The Radio Dept, Asobie Seksu, Wild Nothing, Weekend, No Joy, Big Trouble, Tennis, Surf City, Still Corner, The Joy Formidables, 120 days, etc etc. Et j'en oublie tellement l'influence du shoegaze est variée et omniprésente en 2012. Ce blog en est une preuve.
L'utilisation d'internet a dû également faciliter la découverte des légendes de l'âge d'or shoegaze par les jeunes limougeauds.
Et arrive Novembre 2011 avec le festival Pop sur la ville de la vieille mais toujours verte asso, Melting Pop. Et là, enfin, le miracle. Le groupe s'appelle Parqks, et comme les deux autres groupes dont il va être question, ils revendiquent le terme shoegaze. C'est devenu un gimmick publicitaire chez de nombreux groupes français de nos jours. C'est souvent inapproprié, parfois malhonnête, mais en ce qui concerne Parqks et leurs collègues totalement justifié. Dire qu'ils ont écouté Mogwai et Sonic Youth en plus de MBV est une évidence. Godspeedyou! Black Emperor certainement. Ils ravivent aussi la flamme du souvenir d'une légendaire formation corrézienne *(cf à la fin).
Voici la vidéo de ce concert.
"Enfin!" me suis-je dit. Enfin du shoegaze à la limougeaude. Près de 20 ans d'attente pour trouver un truc qui tienne la route (mille excuses si j'oublie quelqu'un). Plus tard dans la soirée, les membres de Melting Pop me parlèrent d'une autre formation du coin aux influences similaires. Le rendez-vous était pris, mais que deux bons groupes locaux partagent mes goûts musicaux dans un laps de temps aussi court, je n'osais à peine y croire.
Je ne me souvenais plus du nom du groupe cité par les gens de l'asso et je laissais tomber après une longue prospection infructueuse. Et puis, via Facebook, j'apprends la tenue d'une soirée dans le cadre des sélections du Printemps de Bourges. Et j'écoute les groupes sélectionnés. Et bang! La magie "The Cards" opéra.
Il s'agissait bien des mêmes tant recherchés auparavant. Mountebank, c'est toujours sous influence shoegaze comme Parqks, mais d'autres trucs transparaissent. Moins instrumental, plus pop-song. On pense alors à des groupes comme Best Coast , Memory Tapes ou Vivian Girls. Et sur le lancinant "Burning Eyes", ce sont les fantômes de Mazzy Star et Beach House qui virevoltent dans la pièce.
Du concert de Tulle, de vagues échos déforables arrivèrent à mes oreilles. Par expérience, je laissai de côté les avis de personnes atteintes de surdité pour me précipiter à leur concert limougeaud fin décembre chez Music Passion (magasin de disque). Bien m'en a pris. La magie entraperçue sur le net était bel et bien présente ce soir là. Pour un deuxième concert c'était parfait.
L'histoire ne s'arrête pas là. Jamais deux sans trois. Parqks publie sur son facebook un lien. Et voilà que déboule Kerity. Autre formation limougeaude tout aussi passionnante. On quitte un peu les guitares pour se rapprocher de l'électronique. L'état d'esprit reste le même. M83 et probablement une passion pour l'idm d'Aphex Twin, Autechre, etc...
On peut ici remarquer que derrière Parqks et Kerity se cache une asso basée sur Châteauponsac, Soundscape. Paysages Sonores en français, Dancing With The Noise doit partager pas mal de points communs avec ce qui n'était qu'une bande d'illustres inconnus jusqu'à décembre dernier. A creuser donc...
Oubli !!! :
Pris par l' euphorie, j'avais loupé une autre formation présente sur la page de Soundscape chez Soundcloud, Mako Shopstore. Très proche de Kerity, donc de m83 première époque. Donc ça fait 4 formations prometteuses sur Limoges issues de la mouvance Shoegaze.
A ne surtout pas rater : Le futur ep de Kerity et enfin Mountebank en première partie de Battant le 27 janvier à la fourmi.
http://www.lafourmi87.net/2012/01/27/battant-mountebank/
http://kerity.bandcamp.com/
http://www.myspace.com/parqks
http://mountebank.bandcamp.com/
http://makoshopstore.bandcamp.com/
* La musique de Parqks ravivera le souvenir d'une formation made in Corrèze chez tout bon amateur de musique pas comme les autres de la région. Ce truc totalement inenvisageable, déraisonnable. Ce mix jubilatoire, cette improbable fusion de Mogwai (la musique) avec les Happy Mondays (le mode de vie), Carlosound. Certains titres sont restés, mais parler d'eux sans évoquer ce qu'il faut bien appeler la légende Carlosoundienne est une faute de goût et un manque de savoir vivre en société. Pete Doherty et ses pérégrinations, à côté, c'est quéquette. Ces mecs se rendaient-ils compte de ce qu'ils faisaient ?
Un jour, le patron de Factory enferma dans un studio les cinglés junkies d'Happy Mondays avec le fragile et réservé Vini Riley de Durutti Column. La musique de danse sous ecstasy face à celle beaucoup plus introspective de Durutti. Fallait être irresponsable pour concevoir cette manipulation génétique. Ça a tenu pas plus de deux jours. Il a fallu évacuer d'urgence le pauvre Vini. Et bien les fêlés de Carlossound étaient le fruit de cette expérimentation génétique hasardeuse. Novo; avec en son sein un survivant de l'aventure Carlosound et aussi originaire de Tulle, maintient la tradition depuis. Dans un style proche mais avec un mode de vie plus casanier si j'ose dire.
http://www.myspace.com/carlosound/music/playlists/my-playlist-35768
http://www.myspace.com/novospace
Et bien sûr une petite compile évoquant le shoegaze, des origines à nos jours.
;) j'apprécie le clin d'oeil, mais avant Carlosound, y'a eu Huffy, et ça c'était un peu shoegaze non ?
RépondreSupprimerTu as raison de les citer, mais personnellement je ne m' y retrouvais pas vraiment en terme de shoegazing.
RépondreSupprimerSuper article ! Tu devrais en profiter un mot sur la future compilation Limoges City Rockers ou les Mountebank sont présents !
RépondreSupprimerPas de problème : Pour en savoir plus sur cette compile http://fr.ulule.com/city-rockers/
RépondreSupprimerSalut !
RépondreSupprimerChouette article ! Je voudrais attirer ton attention sur The Noise We Make, groupe limougeaud tout neuf, dont la démo sera disponible dans les prochains jours.
Pour un aperçu :
thenoisewemake.bandcamp.com
Limoges Blood....:)
RépondreSupprimerhttp://www.facebook.com/pages/Somewhere-Underwater/141108125963528?sk=app_178091127385
Limoges Blood ...Factory Heart.
RépondreSupprimerAdopté et futur article. Ce serait pas un des éclaireurs de l' armée shoegaze ?
Un batteur devenu guitariste & chanteur ?
:) plein dans le mille!!... en pleine écriture de démo pour un "premier" album avec ce projet:)
RépondreSupprimersuper ton article ci dessus et super agréable de voir tout ces groupes cool qui émergent!