En passant: L'insaisisable Dean Blunt a encore fait un chef-d'oeuvre.
Précédemment: http://dancingwiththenoise.blogspot.fr/2013/05/en-passant-dean-blunt-continue-d.html & http://dancingwiththenoise.blogspot.fr/2013/09/en-repassant-dean-blunt-frappe-encore.html
Dans la vie rien n'est clair. Tout n'est pas blanc ou noir. Prenons Dean Blunt par exemple. Un coup il peut apparaître comme un putain de pseudo artiste arty poseur et franchement amateur du foutage de gueule et l' instant d' après, on découvre un type tout simple, hypersensible au monde qui l' entoure, un petit artisan qui creuse son petit sillon dans son coin pour faire pousser de merveilleuse fleures vénéneuses. Mais en ce qui concerne le mystère qui entoure cet artiste une seule évidence demeure depuis ses débuts. Ce type est un génie. Un vrai ! Et il vient de nous offrir encore une fois un chef-d' oeuvre. "Black métal".
Dean Blunt vient-il alors de nous offrir son disque le plus "abouti" avec son dernier "Black Métal"?
La question prend une importance considérable quand on connaît le bonhomme et ses oeuvres précédentes. Pour ceux qui ont loupé les épisodes précédents je peux juste vous dire que ce mec chamboule tout sur son passage depuis 2010. Que ce soit sous le pseudo Hype Williams ("One Nation",2011), en collaboration avec la complexe Inga Copeland ("Black is beautifull"2012) ou en solo avec les essentiels "The Redeemer" & "Stone Island" l' an passé. A chaque fois il squatte mes tops annuels (ici & là ) et monte dans la hiérarchie. Ce touche à tout s' est attaqué à bon nombre des marottes DWTN. Hypnagogique pop (ici), R&B, ambient, footwork avec le grand "12" (ici), synth pop et dub (ici), crooner urbain (ici) et enfin une réappropriation du Badalamenti qui s' est révélée avec le temps la plus réussie face à la myriade de pilleurs des oeuvre du pote de David Lynch (ici).
Qu'allait-il nous offrir après son expédition lo-fi russe qu' était "Stone Island" (enregistrée dans un hotel moscovite et uniquement dispo à l'origine que sur un site inconnu du même pays).
Et bien sachez brave gens que Blunt a décidé de nous offrir le plus beau et étonnant album d' indie-pop 2014. Rien de moins. Enfin, "Black Métal" est un album indie-pop qu' à moitié. On est chez Dean Blunt, l' empêcheur de tourner en rond (alors que la majorité des groupes indies ne font plus que ça et devrait se pencher sur son cas histoire de prendre une leçon).
A l'instar de bon nombres des grands disques 2014 cet album est encore un truc porté sur la dichotomie. Comme le Iceage, le Protomartyr, East India Youth, Rustie, le futur Arca ou encore le Total Control. A partir du 7 ème titre, "Forever" nous quittons les territoires Twee-pop et ses guitares jangly à la Felt ou Durutti Column pour les dancefloors enfumés de dub pouvant évoquer une descente difficile de fin de soirée en compagnie des Happy Mondays dans l' Haçienda désertée. Factory Records quand tu nous tient. Et le tout avec un tonitruant et languissant saxo qui dicte sa loi.
La première partie est donc constituée d' espèces de chansons pop pas vraiment construites sur l' ossature classique du genre. Des sortes de motifs répétitifs où apparaissent tour à tour la voix baryton de l'homme et celle de sa copine Joanna Robertson. Une nouvelle fois la voix de Blunt et son phrasé vont être propice à la blague douteuse de "l'inédit de Bill Callahan" tant elles se ressemblent. Celle de Robertson par ses intervention ce sera plutot le souvenir du grand classique de Felt et Liz Frazer (Cocteau Twins) , génial "Primitive Painters" sur lequel lorgne "50cent". Sauf que loin de l'univers indie-gothic-adolescent 80's Blunt nous parle répression policière et criminalité en taclant le rappeur amateur d' hormone de croissance (attention le cancer des testicules te guette 50 Cent).
Dean Blunt nous prévient gentiment que va y avoir le changement de cap "Forever" avec le court "Heavy" par sa cascade répétitive de synthés et ses boites à rythme typique 80's mais le salopard laisse encore planer le doute indie-pop le temps d'un "Molly & Aquifina" somptueux.
A partir donc de "Forever" et de "X" (encore une preuve de sa passion pour Badalamenti) nous quittons les structures carrées de la pop ou du folk pour l' expérimentation dub, noisy et jazzy accompagnée d' un énorme travail d' altération de la source sonore. Il fait comme toujours preuve d'une farouche et courageuse volonté à construire avec l' étrange comme matériau de base.
D' ailleurs en parlant de source sonore l'un des mystère du charme de la musique de Blunt vient du fait que l'on sait jamais trop vraiment si il s' agit d' échantillons piqués chez d' autres ou de l' authentique création musicale.
"Black Métal" est aussi teinté de dichotomie dans ses humeurs et ce que Blunt nous offre de sa personnalité. Tour à tour triste et optimiste, simple et arrogant, arty et terre à terre, résigné et combatif. Bref, le mystère Dean Blunt n' est pas prêt d' être levé au terme de ce grand disque mais comme au début de cette chronique subsistera une seule certitude après l' écoute du disque. Ce type est un pure génie artistique et vient de nous offrir l'un des plus beaux disques de 2014.
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