Dancing With The noise nouvelle version. dernièrement:

En passant : Earth ou, comment créer quelque chose qui a toujours été là ?



Dancing With The Noise comme il a été écrit dans le dernier article s' ouvre aux autres (cf ici ) .
Voici donc, le premier article de PAL.



Comment créer quelque chose qui a toujours été là ?

Voici une question à laquelle Earth, depuis une dizaine d'année, apporte des éléments de réponse.

Rappelons les faits :  de 1990 à 1996, le groupe emmené par Dylan Carlson place le drone sur le devant de la scène et impose le doom-metal comme un courant à part entière de l'underground.
Après une coupure de presque 10 ans, Earth renaît de ses cendres et revient en 2005 pour questionner sérieusement l'essence même du rock à guitare.

Fondateur dans sa première vie, Earth est devenu fondamental dans sa seconde.
Tels des mathématiciens découvrant des théorèmes régissant depuis toujours les lois de la planète, Earth semble produire la matière première avec laquelle ont été façonnées certaines des meilleurs créations sonores des 30 dernières années.
De « Hex, or printing in the infernal method » , l'album du retour, aux influences bluesy, à « Angel of Darkness, demons of light I et II », qui lorgnent du côté de la country et du Folk, en passant par Hibernaculum, qui fait le lien entre les 2 périodes du groupe, la musique de Earth n'emprunte pas au vocabulaire rock : il nous dévoile sa grammaire profonde.

Quoi de nouveau donc pour ce nouvel opus, intitutlé« Primitive and Deadly » ? Globalement, un retour vers une musique plus heavy, mais, surtout, des voix ; voix que nous n'avions plus entendues depuis Pentastar, album sorti en 1996 et pas franchement la plus grande réussite du groupe. Par chance, l'ami Carlson sait s'entourer : ce sont Mark Lanegan, ancien chanteur des Screaming Trees (Earth/Screaming Tress : une évidente connexion naturaliste !) et Rabia Shaheen Qazi, chanteuse du groupe de Seattle Rose windows, qui viennent pousser la chansonnette, ou plus exactement prêter leur organe aux compositions monolithiques du groupe. Le chant, loin d'occuper le premier plan de l'espace sonore, se fond dans le magma earthien, et, loin de dénaturer la musique du groupe, lui donne une consistance nouvelle. Les fondations sonores sont solides : la fragilité toute humaine amenée par les voix de Rabia Shaheen et Mark Lanegan n'ébranle pas l'ensemble, elle le magnifie.Deux morceaux restent instrumentaux, sur les 5 qui composent un album d'une cohésion totale. Il serait d'ailleurs assez difficile, pour ne pas dire un peu hors de propos, d'analyser « Primitive and Deadly » morceau par morceau. Certes, on pourrait dire que « Torn By The Fox Of The Crescent Moon », et « Even Hell has its Hero », les 2 titres instrumentaux, font directement écho aux racines Heavy du groupe, que « From the Zodiacal Light », avec Rabia Shaheen, plus léger, montre qu'on peut avoir la force d'un pachyderme et tutoyer les étoiles , et que « There is a serpent coming » et « Rook across the gates » paraissent directement puiser leur psychédélisme incandescent dans les vies d'écorchés vifs de Lanegan et Carlson, mais on ne saurait se restreindre à l'écoute d'un morceau tant c'est l'ensemble qui fait sens et impressionne.
Enregistré principalement au milieu du désert, comme pour échapper à toute tentation moderniste, l'album montre un groupe plus que jamais vivant et déterminé dans sa quête de l'intemporel.

Quelques messes telluriques seront célébrées par Carlson et ses acolytes en ce début d'année 2015, l'occasion de se convaincre définitivement qu'aucun autre groupe actuel ne sait extraire aussi bien la substantifique moelle du rock à guitare des 3 dernières décennies.

PAL

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