Dancing With The noise nouvelle version. dernièrement:

En passant : Grumbling Fur, des druides pour notre époque





Je sais les enfants. Ce monde est un gros ramassis d' immondices qui fonce droit dans le mur en nous emportant de gré ou de force avec lui . Réchauffement climatique, extrémisme crétin de tout poil comme seul réponse à notre crise de civilisation, capitalisme libéral triomphant à deux doigts d' écrabouiller son trône doré fait à la sueur des peuples. Des peuples qui se soulèvent par de vif accès de violence et de délires incontrôlés quand ils se abrutissent pas devant une putain de partie de baballe. On a envie de s' enfermer dans sa coquille en croyant que ça ira mieux. Et si une solution existait à l'image de tout ces citadins occidentaux effectuant un retour à la ruralité, à mère nature et nos vieilles croyances occultes.
Imaginez.
Par une belle nuit étoilé, vous et quelques uns êtes regroupés dans une clairière d'une forêt inconnue. Le feu au milieu du groupe crépite et réchauffe vos coeurs et vos âme. Ce même feu qui inévitablement évoque les brasiers fruit d' émeutes qui envahissent toutes les cités modernes de notre monde. Ces brasiers que l'on peut percevoir de votre lieu d' exile bucolique. Et pour encore mieux oublier sans toutefois renier ce qui arrive à votre ancienne civilisation vous avez quis l' aide de deux druides au savoir gigantesque et possédant la sagesse de ceux qui ont exploré les tréfonds de l' âme humaine. Et autour de ce feux ils vous ont concocté des mixture faite de ce que nous a offert Mère Nature pour aider à aller mieux et ainsi, trouver une solution.
Une potion magique aux effets hallucinogènes garantis. Ces druides ce sont les Grumbling Fur, anglais auteurs de l'un des plus bel album psychédélique de cette année.



La résurgence de musique psychédélique bat son plein depuis quelques années. Tame Impala en grands ordonnateurs et une multitude de groupe garage et/ou indie qui suivent avec plus ou moins de réussite. Mais il ne faut surtout pas classé à la va vite les Grumbling Fur à leurs coté. Enfant d'une très vieille tradition psyché britanique (Folk ou pop buccolique à la XTC ou Syd Barrett fin de carrière) ils délaissent volontiers les grosses guitares avec leurs pédales de distorsion et évitent le rentre-dedans nostalgique rock. Leur truc c' est plutot une musique psychédélique plus sophistiqué et délicate. Guitares absentes, en lieu et place nappe de synthés, cordes et chants grégoriens teintés de chamanisme. Ils n'ont pas oubliez non plus que le psychédélisme est un voyage à travers l' âme humaine. Un voyage au cours duquel il n'est pas seulement question d' hallucination multicolore où les fraises volent et les éléphants sont roses. Un périple narcotique dans les tréfonds de l'âme, le bien comme le mauvais. Entre vision paradisiaque et cauchemardesque. Accepter les deux faces pour une renaissance.


La différence du projet de ce duo constitué d' Alexander Tucker et de Daniel O'Sullivan peut s' expliquer en grande partie par leur parcours.  Fans de hardcore métal à l' origine, ils ont goûté à tout. Jazz, musique expérimentale, post-rock, doom métal et drone. Ils ont même collaboré avec les grands Sunn o))). Au tout début Grumbling Fur n' était pas résumé qu'à ces deux gugus. D' autres se joignaient à eux pour des improvisations live bien éloignées des aspiration pop du nouvel album ("Preternatural") et de son prédécésseur ("Glynnaestra"). On peut d' ailleurs découvrir à quoi ressemblait la musique première période de Grumbling Fur sur leur premier long format, "Furrier".
"Furrier" (dispo ici) est constitué en grande partie de pastilles dronesques contemplatives faites de son électro glitch et d'autres  acoustiques pastoraux .
Une fois enfin seul, Tucker et O'Sullivan continuent leurs aventures en prenant un virage résolument plus pop tout en gardant ce qui faisait la singularité et l' aspect mystérieux de leur musique. Ma découvert en début d' année leur "Glynnestrea" sorti en 2013 fut une claque.  Leur assemblage sonore lorgnaient donc plus vers le psychédélisme pop que ses prédécésseurs  plus expérimentaux et m' évoquait  parfois le savoureux souvenir des légendaires Beta Band tant adulé par ici. Notamment avec ces deux pépites pop psyché, le rêve éveillé "The Ballad of Roy Batti" avec ses claquements de mains et l' électropop "Protogenesis" avec son petit coté post baggy/madchester qu' avait aussi les écossais du Beta.





Mais attention. Le psychédélisme à la Madchester était produit bien souvent à des fins purement hédonistes. Les gamins recherchaient l' extase dans les nouveaux sons électro (l' acid house) tout en se référant à  l' histoire du rock via le psychédélisme heureux de la fin des 60's. The Stone Roses avaient beau inclure dans la fiesta des éléments sociaux, Shaun Ryder  par sa poésie spéciale nous faire entr'apercevoir indirectement l' aspect glauque c'était l' euphorie qui régnait.
Avec "Preternatural" les Grumbling continuent leur rencontre avec la beauté et les tréfonds de l' âme. Et le tout en prenant un virage encore plus pop. Comment est-ce possible? D'abord l'intro du disque. Ce "Neil Ferguson Fanclub" qui commence par le grincement d'une porte, des cliquetis aigus évoquant des talismans de sorcelleries suspendus aux branches d'une foret lugubre puis des rires terrifiants féminins. Hommage parfait au fameux Ferguson que tous les aventuriers musicaux et artistiques connaissent sous le pseudo de Génésis P Orridge (Throwbbing Gristle, Psychic TV). L' instrumental se clôture à nouveau par cette porte qui se referme. Et ...bang!
Décollage pour les étoiles avec cette merveilleuse pop-song "All The Rays". Comment passer de la foret du "Projet Blair Witch" à la fumette dans un pré fleuri par un doux et beau mois de Mars. Mais attention, les voix sortis d'on ne sait quels tréfonds clôturent le titre. Et l' aller retour entre espoir et frayeur reprend de plus bel avec l' autre tube, "Lightinisters", collaboration avec le Dorian Grey de l'indie-music britanique, l' éternel beau gosse rescapé de Madchester et de la Britpop, TIM BURGESS ! 47 ans au compteur et je connais plus d'une jeunette qui en ferait son 4 heures.




Grumbling Fur - Lightinsisters Ft. Tim Burgess (Live) from Chris Burwin on Vimeo.


Les Grumbling Furs nous expliquent avoir enregistrer leur disque dans une maison Victorienne pourvue d'un magnifique jardin située à Tottenham, banlieue Londonienne marqué fortement par les émeutes d' Aout 2011. Entre buccolisme et émeutes sociales. Ce lieu équivalait à leurs yeux à une sorte d' îlot paradisiaque. Et pour l' étrange dans leur paradis les Grumbling nous précise que la fameuse maison est décoré d'une grande collection des oeuvres du peintre spécialiste de l' occulte Austin Osman Spare. Spare était aussi magicien à ses heures perdues.



Leurs chansons prennent donc des apparences paradisiaques et très simplistes avec ce virage pop mais le truc est bien plus subtile en fait. Leurs entraînantes chansonnettes pop à deux voix atteignent toujours à un moment où la mélodie semble s' écrouler et se briser en mille morceaux. Cette pop fragile par instant est entourée de pastille abstraites plus complexes en ligne directe avec leurs débuts. On peut voir dans les deux derniers disques des Grumbling Furs le lien entre deux mouvements très présents et intéressant en ce moment. Le psychédélisme donc,Temples, Jagwar Ma, Tame Imapla, Jacco Gardner , et, le coté obscure et sombre de la Dark Ambient souvent teinté d' occulte des Demdike Stare, d' Haxan Cloak, Vessel et Raime entre autres. Le spectre de Génésis P Orridge est omniprésent, par conséquent celui aussi d'un autre grand aventurier des tréfonds de l' âme humaines sous psychotropes et autres substances risquées. William S Burrought. Beaucoup moins fun que les éléphants roses.
Ce mélange de facilité d' accès et d' étrangeté m' évoque un autre grand disque de 2014 déjà abordé ici, le pourtant éloigné "Typical Controle"  de Total Control. Pas si éloigné que ça d' ailleurs, puisque à l' instar des Australiens fans de post-punk nos deux druides britanique tapent allègrement dans la Kosmiche Music (Harmonia,Cluster, Neu!) depuis leurs débuts. Saint Brian Eno doit approuver les pastilles ambient du disque.
"Preternatural" se termine par l' entraînant et flippant "Pluriforms" avec encore ces voix venus d' outre-tombe au contact des chants spacieux et angéliques de Tucker et O'Sullivan.
"Pluriforms" résume bien les messages de ce magnifique disque.



On peut à la fois expérimenter en recherchant l' étrange  sans pour autant ne faire que dans le sombre. Il faut laisser une place à l' optimisme sans tomber dans la béatitude non plus, se confronter à l' inexplicable et l'inconnu, devenu trop souvent synonyme de nos jours de peur et de pessimisme.
Merci les druides.



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