En passant: Shapednoise, VioletShaped, le label VioletPoison

Mais pourquoi donc des types comme moi se sont-ils mis à écouter (re?) du dark et de l'industriel passés par entre les mains de  électro?
Pourquoi vouloir chercher le truc dans l' obscurité et le bruit des machines plutot que dans les lumières éclatantes et naturelles que sont censés nous apporter   la pop, le rock ou les boiserie du folk. Pourquoi oser affronter les longues plages mystérieuses de Demdike Stare, la beauté  mystérieuse d'un Vatican Shadow, Raime, Tropic of Cancer, l' électro froide de Silent Servant et bien sûr le plus beau et prometteur de ces joyaux des ténèbres, The Haxan Cloak.
On dira  probablement que le coupable c'est l' air du temps . C'est souvent comme ça en temps de crise. Certains n'osent plus s'aventurer dehors et enfile fissa leurs charentaises et ce qu'ils connaissent déjà quand d' autres préfèrent aller voir ailleurs et quitter leur confort juste pour savoir pourquoi en est-on arrivé dans cette galère sans vraiment se soucier non plus si au bout de leur quête il y a une porte de sortie. Quoique.
Mais laissons immédiatement de coté les visions simplistes. Chacun peut appartenir tour à tour à l' une des deux manières d' aborder la musique de nos jours. Suffit juste de ne pas abuser de l'une pour ne pas devenir un sanctuaire fermé à toutes sortes de nouveautés, devinez laquelle.
Ce coup-ci je jette mon dévolu sur Shapednoise et sa collaboration au sein de Violetshaped pour son propre label Violet Poison
 Je sais peu de choses sur la personne qui se cache derrière Shapednoise sauf qu'il est italien et réside à Berlin. Il vient de sortir "The day of revenge" et ce premier album squatte mon quotidien et mon esprit alors qu'il n' avait été téléchargé que par pure hasard et surtout sans l' engouement  qui accompagne habituellement les productions de leur patron de label Dominick Fernow (Prurient & Vatican Shadow).
L' entrée en matière est d'une efficacité à toute épreuve et résume bien le propos de Shapednoise. Tout d' abord une terrible détonnation  répetée  et progressivement disséquée par la réverbération ("Transcendental experiences"). Une rythmique industrielle entre en jeu  après qu'une voix féminine lointaine nous ait annoncé ce qui allait se passé. La détonation du début n' a pas cessé. Grincements et frottements sonores souvent répétitifs avec bourdonnement sourd constitueront l' essentiel de la suite du disque. L' ambiance s' assombrit à mesure que nous progressons  dans ce disque  très cinématographique. On a l'impression que nous visitons de nuit une usine désertique où il ne subsiste plus que d' étranges machines  laissée à l' abandon par  l' exode industriel que subit l' Europe. Sauf qu' elles fonctionnent encore ces créatures mécaniques et Shapednoise en les actionnant nous rappelle que l' homme était autrefois ici et que ces monstres froids recèlent en elles parfois une humanité ignorée. Les pistes se succédant un sentiment d' angoisse  et de questionnement s' empare de nous. "Mais alors  ? Les hommes qui ont créé ces machines, qui les ont utilisé et ont souffert ici. Que sont-ils devenus?

A coté de son projet solo Shapednoise s' est associé avec le tout aussi énigmatique VioletPoison pour fonder le label  du même nom et sortir le projet portant l' intitulé Violedshaped. Moins cinématographique et plus techno à l' attention des dancefloor l' album séduit tout autant que "The Day of revenge" même si il parait plus agressif. Et agressif surtout parce qu'il semble vouloir apporter des suggestions à la question posé par Shapednoise,"Que sont-ils devenus?". Shapednoise en utilisant des samples  de films d' horreur (musique anxiogène et cris d' effrois) répond si brutalement et si simplement que nous n' avons plus du tout envie d' en savoir plus. L' homme a bel et bien déserté les usines  et c'est malheureusement pour des territoires où règne la solitude individualiste encore plus désertiques et inhospitaliers  que ce que nous avaient paru jusqu' à présent ces vestiges de la révolution industrielle. Violetshaped sait que le pire était après l' âge d'or des usines européennes et  réinvestit ces anciens lieux de rencontres et d' affrontement sociaux en les transformant en un majestueux dancefloor gothique.